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LA SECONDE MONDIALISATION

dimanche 18 septembre 2016
par  Jacques-Robert Simon
popularité : 40%

Personne ne doute que le monde ancien n’a plus aucun avenir : les philosophies, les idéologies, les concepts politiques et même les valeurs morales qui animaient les peuples semblent ne plus avoir de raison d’être. Le dieu même qui avait fourni le cadre de vie de tous depuis la nuit des temps est bel et bien mort après qu’on ait annoncé sa fin il y a un peu plus d’un siècle. Les idées, les dogmes, les raisons sont remplacés par les seules lois du commerce, le quantitatif a remplacé le qualitatif, ce que l’on peut mesurer rend sans intérêt ce que l’on croit et qui est impalpable. Pourtant la mesure d’une quantité ne renseigne pas sur le pourquoi de celle-ci et n’indique rien sur son utilité. Le libre-échange est pourtant prôné partout et pour tous. Un référentiel de société ne fonctionne que s’il est considéré comme un absolu indépassable et indiscutable : ce fut le cas de dieu, sera-ce aussi le cas pour le libre-échange ?

La cohérence est le facteur primordial pour assurer la force dominatrice d’un clan, d’une communauté, d’une nation. La principale fonction de dieu ici-bas était de permettre à quelques uns de régner sur tous. En effet la seule contrainte n’est pas suffisamment efficace, il faut encore que des croyants zélés acceptent leur statut de serviteur pour forcer d’autres à l’obéissance. Dieu peut fournir la transcendance nécessaire à l’acceptation de cette soumission qui permet d’engendrer des affidés qui aideront ceux qui dominent à dominer davantage. Il ne faut pas se méprendre, les églises ne sont qu’un des moyens pour mettre en œuvre ce processus, l’esprit républicain et toutes les idéologies humanistes relèvent de la même essence : il n’est pas nécessaire de croire en dieu pour le servir. Les nations européennes certaines de leur force, de leurs sciences, de leurs cultures se lancèrent à la conquête du monde lors des périodes coloniales. En 1914, britanniques, français, russes et turcs se partageaient la grande majorité de la planète (en ôtant en partie la Chine). La cohérence qui aurait dû être atteinte pour assurer la stabilité du système fut désintégrée sous les coups de nationalismes souvent empreints de laïcisme. La mondialisation conduite sous la férule des européens, de leur dieu, de leurs valeurs, de leurs « lumières » s’éteignit irrémédiablement. Le dieu chrétien et sa cohorte de savants si efficaces pour assurer une même âme en Europe se révélèrent inefficaces pour assurer la bonne marche de la planète entière. Il est de fait plus difficile d’assurer la cohérence d’un grand ensemble constitué de beaucoup d’éléments que d’un autre plus restreint. La cupidité était aussi un des ressorts principaux des élans coloniaux. Elle complémentait fort utilement les propositions affichées de transcendance.

Le paradis chrétien s’atteint (théoriquement) en faisant preuve de sagesse et d’amour d’autrui. Le paradis du monde des affaires ne postule aucune de ces vertus et se contente de penser que sans intervention le système s’autorégule, quelques lois interfèrent mais elles sont le plus souvent néfastes. Le marché est le lieu où se rencontrent l’offre et la demande et où s’opère la détermination du prix d’un bien, la valeur d’un être : c’est en payant qu’on donne une valeur à tout et à toutes. Le marché peut être vu comme le support de la démocratie car il suppose, au moins virtuellement, l’égalité des individus. Toutefois, même les plus fortunés ne sont pas égaux entre eux : le pouvoir de domination est aisément quantifiable, il est directement relié à la masse des capitaux disponibles, le plus riche est le plus puissant, tellement même qu’il arrive à faire croire que c’est son talent qui l’a conduit où il se trouve. Depuis des décennies la moitié de la population des pays occidentaux ne lègue rien à leur décès à leurs successeurs, c’est une bonne définition des pauvres. Dans le même temps, les sommes amassées par les franges « supérieures » atteignent les plus hauts niveaux, ceux connus à la fin du dix neuvième siècle, la rente financière a simplement succédé à la rente foncière. Il serait possible de postuler que la concentration du pouvoir en quelques mains permet une meilleure efficacité économique. L’examen de la situation actuelle ne permet en rien de le croire. Il importait de répondre la bonne parole sur le monde entier : « La concurrence libre et non faussée » et non plus des slogans divins comme « Liberté, Égalité, Fraternité » devait régir le monde. C’était indispensable pour que les gens subissent ce qu’on leur demandait de subir : subir une précarisation supplémentaire pour le bien être de quelques uns. Un examen sommaire permet de démonter la proposition mercantile : une concurrence ne peut structurellement pas être libre et encore moins non faussée, à moins de ne pas tenir en compte les privilèges liés aux fortunes héritées. L’ingéniosité de la voie marchande vers la mondialisation est de favoriser l’émergence de classes bourgeoises dans l’ensemble des pays, y compris les pays émergents. La cupidité étant la chose la mieux répartie au monde, une internationale des classes aisées, donc dominantes, peut s’installer avec beaucoup plus d’aisance que lors du colonialisme centralisateur, mono-culturel et sous le couvert d’un dieu unique. Chaque pays fait émerger ses propres « riches » qui sont en charge de structurer la nation. Aucun conflit cultuel n’est à attendre des rivalités internationales, les philosophies étant devenues identiques, les folklores locaux ne servant plus que pour les touristes. Les détenteurs de capitaux pour maintenir leur fortune doivent mettre à leur service le maximum de gens. Les républiques » permirent aux « humbles » de s’unir pour posséder la force suffisante pour faire prévaloir leurs droits. La nouvelle mondialisation permet de délocaliser les investissements dans les pays où la bourgeoisie locale peut faire régner l’ordre dans une classe prolétaire infiniment plus démunie qu’en occident ; il s’en suit une déstabilisation des pauvres des pays riches afin de permettre l’émergence d’une classe bourgeoise dans les pays pauvres grâce à la délocalisation des industries fort demandeuses de main d’œuvre. L’émiettement des intérêts des travailleurs participe grandement à la non remise en cause d’exploiteurs qu’il est convenable de nommer investisseurs pour préserver son image de modernité.

Alors mondialisation ou immondialisation ? Pour les travailleurs des pays riches la réponse ne fait aucun doute. Pour ceux de l’ensemble de la planète, la réponse est plus réservée. Cette seconde mondialisation a toutes les chances de réussir, pas seulement parce que les classes bourgeoises de tous les pays y trouvent leur compte mais aussi parce que les peuples récupèrent des oripeaux de bonheur : des portables, des McDonald’s, des casquettes US, des matchs de football constellés d’idoles, des monstres sacrés du cinéma servant d’ersatz de dieux, des drones qui exterminent les seuls barbares avec la même efficacité que dans un jeu vidéo … La justice qui devait régner sur le monde est remplacée par le pragmatisme, ainsi nommé pour ne pas désigner la loi du plus fort. Personne ne doute que celle-ci est efficace. Mais la seule mutation qui importe est celle qui conduit à un monde qui se satisfait de ses ressources. La sobriété des consommations comme l’usage raisonnable des biens doivent être atteints pour éviter une disparition pure et simple de l’espèce humaine. L’homogénéisation du monde telle qu’elle s’opère est très probablement un préalable nécessaire. Il faudra encore se préoccuper de l ‘égalité entre tous, notion qui relève de nouveau d’un idéal. Mais qui pourrait se contenter d’une société faite de maîtres repus et d’une multitude d’esclaves privés de tout et surtout de respect ?


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