https://www.traditionrolex.com/18 La Gauche Cactus http://www.la-gauche-cactus.fr/SPIP/ fr SPIP - www.spip.net (Sarka-SPIP) L'IRAN, LE RETOUR http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article2045 http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article2045 2016-03-24T19:43:18Z text/html fr Michel Rogalski Longtemps écarté de la scène internationale comme acteur de poids, l'Iran est en passe d'y faire un retour remarqué. L'avènement, en 1979, de la République islamique succédant au régime du shah, avait marqué le début de l'isolement du pays et de l'ostracisme que lui témoignaient les puissances occidentales. Après plus d'une vingtaine d'années d'interventions des États-Unis et de leurs alliés dans la région (Afghanistan, Irak, Libye, Syrie) (...) - <a href="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?rubrique62" rel="directory">Iran</a> <div class='rss_texte'><p>Longtemps écarté de la scène internationale comme acteur de poids, l'Iran est en passe d'y faire un retour remarqué. L'avènement, en 1979, de la République islamique succédant au régime du shah, avait marqué le début de l'isolement du pays et de l'ostracisme que lui témoignaient les puissances occidentales. Après plus d'une vingtaine d'années d'interventions des États-Unis et de leurs alliés dans la région (Afghanistan, Irak, Libye, Syrie) traduites par des échecs et le chaos, la situation est devenue tellement dégradée et incontrôlable qu'il n'est plus possible d'envisager un retour à un minimum de stabilité sans une implication, inimaginable hier encore, de l'Iran qui contrairement à toute attente a pu faire face douloureusement à des décennies de sanctions économiques et montrer, en accueillant les 120 pays participant au 16e Sommet des non-alignés en 2012, qu'on devait encore compter avec lui.</p> <p>Ce retour reste hypothéqué par la conclusion d'un accord en cours de négociation avec les pays du groupe 5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies + l'Allemagne). Elles portent sur une possible dimension militaire du programme nucléaire iranien. Depuis les mandats de Clinton le problème est posé et confronte l'AIEA à l'Iran accusé de fait de violer ses engagements pris à travers son adhésion en 1968 au Traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Il lui est reproché, sous couvert de recherche scientifique à des fins civiles, de mettre en œuvre un vaste dispositif plus ou moins dissimulé lui permettant d'accéder à l'arme nucléaire. À l'ombre de ce contentieux se déroule une guerre de l'ombre menée par Israël et les États-Unis visant à retarder au maximum l'avancement de ce programme en recourant à des attaques informatiques et à l'assassinat systématique des scientifiques associés à ce projet. L'Iran nie totalement les intentions qui lui sont prêtées et a donné suite à des demandes d'inspection de l'AEIA largement plus intrusives que celles habituellement pratiquées par cette institution. Il revendique le droit à développer des formes d'énergie nucléaire à des fins civiles et scientifiques.</p> <p>Depuis trente années différents types de sanctions sont imposés à l'Iran qui proviennent d'entités différentes : des États-Unis, des Nations unies et de l'Union européenne. Peu de pays en ont subi autant. Elles touchent des secteurs aussi divers que le pétrole, la finance, la santé et ont contribué à fragiliser l'économie et rendu difficile la vie quotidienne des Iraniens. À cela s'est ajoutée dans la dernière période la chute brutale du cours du baril de pétrole. Les négociations actuellement en cours à Vienne et qui se prolongeront au-delà de la date butoir du 30 juin initialement prévue sont d'une grande importance d'un double point de vue. Il s'agit tout d'abord du danger d'une prolifération nucléaire dont la crainte est fondée. Enfin, par-delà l'accord, ce qui est en jeu c'est la place de l'Iran dans la région et ses possibilités d'être un partenaire de stabilisation d'une zone qui s'enfonce dans le chaos, le seul à rester capable de contrer l'avancée des intégristes islamistes regroupés au sein de l'organisation de l'État islamiste ou s'en revendiquant. En clair la première victime d'un tel accord serait l'axe privilégié entre l'Arabie saoudite, les États du Golfe et les États-Unis. Le jeu des alliances s'en trouverait bouleversé, Washington considérant que l'entente avec les chiites doit dorénavant être recherchée, au grand dam de la Turquie, de l'Arabie saoudite, d'Israël (évoquant l'éventualité de frappes militaires) et de la France (durcissant les conditions), pays qui s'ingénient depuis l'accord-cadre d'avril 2015 conclu à Lausanne à pousser les actuelles négociations de Vienne à l'échec.</p> <p>Son succès est menacé non seulement par les États cités mais également par des forces politiques tant en Iran qu'aux États-Unis. Le voyage de Benjamin Netanyahu en mars et son discours au Capitole ont montré la vive réticence d'une part de la classe politique américaine et le souci de Barak Obama d'agir avant la fin de son mandat, souci certainement partagé par le président Hassan Rohani. En Iran, des forces conservatrices et extrémistes, influencées par l'ancien président Ahmadinejad et une fraction des gardiens de la révolution, réticents à un axe Téhéran-Washington, s'emploient également à faire capoter tout règlement négocié. Le temps est révolu où, en 2002, Georges W. Bush incluait l'Iran dans l'« axe du mal » aux côtés de l'Irak et de la Corée du Nord. Il semble qu'à Paris on n'ait pas pris la mesure du chemin parcouru et qu'on reste attaché à de vieux schémas. L'accord est à portée de mains. Pour l'essentiel, il vise à brider le programme nucléaire des Iraniens en échange d'une levée des sanctions internationales. Après, tout est dans les nuances, mais elles peuvent être importantes. La levée des sanctions est inséparable d'un calendrier qui en fixe l'échéancier ou d'un mécanisme qui l'annule automatiquement en cas de manquement aux engagements pris. Les uns veulent une levée immédiate « au premier jour de l'application de l'accord », les autres la veulent plus progressive. Là où les uns parlent d'automaticité en cas d'inobservance, les autres suggèrent un retour vers le Conseil de sécurité où le blocage d'amis serait possible. Il reste des désaccords sur le caractère plus ou moins intrusif des inspections de tous les sites, notamment ceux qui sont strictement militaires, leur durée et le taux permis d'enrichissement de l'uranium, ainsi que le nombre de centrifugeuses tolérées. Barack Obama a considéré que la demande d'Israël d'inclure dans l'accord une reconnaissance « claire et sans ambiguïté » du droit à l'existence d'Israël, constituait une « erreur de jugement fondamentale ». Ces négociations doivent s'apprécier également à l'aune du bilan de l'application du Traité de non-prolifération nucléaire.</p> <p>Le TNP se propose d'empêcher la dissémination des armes et de la technologie nucléaires et à promouvoir le désarmement. À l'exception de trois pays – l'Inde, le Pakistan et Israël – le TNP s'est aujourd'hui universalisé. La fonction de tels traités à vocation universelle est toujours, après un certain temps de décantation, de braquer le projecteur sur les plus réticents qui d'une certaine façon s'auto-dénoncent. Outre la fonction pour laquelle il est créé, le traité marque d'emblée l'intentionnalité du non-signataire. C'est pourquoi certains États, plutôt que de rester à l'écart du traité – qui confère par ailleurs certains avantages – préféreront le signer quitte à ne pas le respecter. Ce fut le cas de la Corée du Nord et c'est ce dont est suspecté aujourd'hui l'Iran. Ainsi on peut tenter de proliférer à l'abri du traité – Corée du Nord, Iran – ou à l'écart du traité - Inde, Israël, Pakistan. La première posture sera considérée comme déloyale et pourra ouvrir la voie à des sanctions, alors que la seconde sera ouverte et légale car l'on ne peut s'obliger aux termes d'un accord que l'on n'a pas signé. Il reste qu'aucun État signataire n'a pu accéder au statut de puissance nucléaire, ou tout le moins le conserver. Ce qui constitue un beau succès pour le régime international de non-prolifération nucléaire institué par le TNP. Des continents entiers ont accepté d'être zone dénucléarisée, comme l'Afrique et l'Amérique latine. La situation de l'Iran situé à la charnière de l'Asie et du Moyen-Orient reste particulière. Cette région concentre des États nucléaires hors TNP (Inde, Pakistan, Israël), ou signataire (Chine), des pays en voie de démanteler (Corée du Nord), des pays du seuil pouvant en quelques mois accéder au statut de puissance nucléaire (Japon, Corée du sud). Les statuts et les trajectoires sont multiples et rendent la région disparate du point de vue du nucléaire. Aucune règle commune ne semble ainsi s'appliquer. Selon une déclaration de six anciens ambassadeurs de pays européens en Iran (Le Monde du 9-6-2011) « une majorité d'experts, y compris en Israël, semble plutôt estimer que l'Iran cherche à se poser en ˝pays du seuil˝ ». Un des points encore en discussion dans la négociation serait de savoir quel serait le délai raisonnable qu'il faudrait imposer à l'Iran pour passer de l'état de pays du seuil à celui de détenteur de l'arme nucléaire. Trois mois ? Un an ? Mais quelle que soit l'issue des négociations en cours, cela n'affectera pas le fait central, le retour de l'Iran sur la scène moyen-orientale et son affirmation comme puissance régionale incontournable dont la stabilité détonne dans le chaos environnant. Les Etats-Unis, qui ont offert contre toute attente de leur part une influence décisive à l'Iran qui se retrouve en protecteur de Bagdad et de Damas, n'ont d'autre issue que de renouer le dialogue avec le grand Satan d'hier quitte à fâcher Djeddah et Tel Aviv.</p> <p><i>Article paru dans la revue Recherches internationales : <a href="http://www.recherches-internationales.fr/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://www.recherches-internationales.fr</a></i></p></div> MANIFESTE POUR LA LIBERATION DES FEMMES EN IRAN http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article1059 http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article1059 2010-02-03T11:48:00Z text/html fr Maryam Namazie L'existence affirmée du régime islamique en Iran est incompatible avec la liberté des femmes. La République Islamique d'Iran est un état misogyne, architecte d'un apartheid des genres perpétuant trois décades des formes les plus odieuses d'abus, de discriminations et de violences contre les femmes en Iran. Une société ne peut pas être libre si les femmes ne sont pas libres. Sans le renversement du régime islamique misogyne, les femmes en Iran ne pourront pas exercer (...) - <a href="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?rubrique62" rel="directory">Iran</a> <div class='rss_texte'><p>L'existence affirmée du régime islamique en Iran est incompatible avec la liberté des femmes. La République Islamique d'Iran est un état misogyne, architecte d'un apartheid des genres perpétuant trois décades des formes les plus odieuses d'abus, de discriminations et de violences contre les femmes en Iran. Une société ne peut pas être libre si les femmes ne sont pas libres. Sans le renversement du régime islamique misogyne, les femmes en Iran ne pourront pas exercer leurs droits. La République Islamique doit cesser ! Tel est le message de Nega Agha Soltan, le symbole de la révolution naissante en Iran. C'est la décision des femmes braves qui ont défié l'état islamique aux premiers rangs des protestations populaires au cours des huit derniers mois.</p> <p>Il y a trente ans, le 8 mars 1979, nous, femmes et hommes iraniens amoureux de la liberté, nous sommes levés devant les réactionnaires qui venaient d'arriver au pouvoir, en criant Non au voile obligatoire. Aujourd'hui, avec la douloureuse et sanglante expérience de trois décades d'apartheid des genres, d'esclavage des genres, nous demeurons encore plus clairement et résolument aux côtés de la jeune génération progressiste pour que la République Islamique, en tant qu'état misogyne, en tant que régime d'apartheid des genres soit renversée. Nous disons que les dirigeants de la République Islamique doivent être arrêtés et traduits devant les tribunaux pour crimes systématiques contre des millions de femmes, pour crimes contre l'humanité. Telle est la volonté de la révolution en Iran. Avec le renversement de la République Islamique, nous tendrons une main secourable aux millions de femmes des pays où l'islamiste les frappe, prisonnières d'états et de bandes islamiques terroristes et de leurs traditions chauvinistes mâles.</p> <p>Aujourd'hui, le soutien à la révolution en cours en Iran peut et devrait devenir un vaste mouvement international. Le 8 mars est la journée internationale des femmes qui, cette année, porte la marque de la solidarité avec les femmes et le peuple d'Iran dans sa lutte pour abattre le régime islamique. Nous appelons les militants des droits des femmes et leurs organisations à exprimer leur solidarité avec le mouvement des femmes iraniennes, en se souvenant de Neda Agha Soltan comme symbole du mouvement révolutionnaire contre la République Islamique. Le 8 mars, cette année, est la journée de solidarité avec le mouvement du peuple iranien pour sa liberté.</p> <p>Nous publions le Manifeste pour la Libération des Femmes en Iran qui suit et appelons tous les militants pour les droits des femmes et leurs organisations laïques et progressistes à soutenir ce Manifeste et à exprimer sa solidarité avec le peuple iranien en lutte pour renverser ce régime islamique d'apartheid des genres :</p> <p>1. Poursuite des dirigeants et officiels de la République islamique pour crimes contre l'humanité, y compris pour les trente années des plus vils abus, discriminations et violences contre les femmes en Iran. 2. Abolition de toutes les lois islamiques misogynes et discriminantes envers les femmes ; complète égalité des femmes et des hommes dans toutes les sphères économiques, politiques, culturelles, sociales et familiales. 3. Séparation totale de la religion et de l'Etat, dans toutes les lois et dans le système éducatif. 4. Abolition de la ségrégation des sexes et de l'apartheid des genres. 5. Prohibition du sighe (le « femmes à louer » islamique) et de la polygamie ; droit au divorce sans restrictions pour les femmes et les hommes ; abolition de toutes les lois qui conditionnent les droits civils des femmes à la permission du mari, père ou autre membre mâle de la famille (comme le droit de voyager, d'avoir des relations ou des activités sociales, etc) ; complète égalité des femmes et des hommes dans l'éducation et le soin des enfants après une séparation 6. Abolition du voile obligatoire ; interdiction du voile pour les enfants, complète liberté concernant les vêtements. 7. Abolition de toutes les lois barbares, lapidation, exécution, talion et autres châtiments islamiques 8. Liberté inconditionnelle d'expression de manifestation de grève, de réunion, d'association et de créer des partis politiques. 9. Libération immédiate des prisonniers politiques ou en raison de leurs convictions philosophiques 10. Liberté religieuse et pour l'athéisme, et liberté de critiquer la religion.</p> <p><i>Pour signer le manifeste : <a href="http://equal-rights-now.com/IntWD/IntWD649.php?nr=63719093&lang=en" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://equal-rights-now.com/IntWD/I...</a></i></p></div> Impressions d'Iran sur fond de risque de guerre http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article421 http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article421 2006-06-27T15:08:00Z text/html fr philippe zarifian Je viens de réaliser, du 9 au 23 avril 2006, un voyage de deux semaines en Iran. 4000 km, parcourus en car, dans la totalité des régions et des principales villes du pays. De très nombreuses conversations avec des Iraniens de tous âges, qui venaient spontanément à nous. C'était en majorité des jeunes. Je ne saurais, sur la base d'un voyage aussi limité dans la durée, présenter une quelconque analyse rigoureuse de ce qu'est l'Iran et de sa situation actuelle. Par (...) - <a href="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?rubrique62" rel="directory">Iran</a> <div class='rss_texte'><p>Je viens de réaliser, du 9 au 23 avril 2006, un voyage de deux semaines en Iran. 4000 km, parcourus en car, dans la totalité des régions et des principales villes du pays. De très nombreuses conversations avec des Iraniens de tous âges, qui venaient spontanément à nous. C'était en majorité des jeunes. Je ne saurais, sur la base d'un voyage aussi limité dans la durée, présenter une quelconque analyse rigoureuse de ce qu'est l'Iran et de sa situation actuelle. Par contre, il m'en est resté des impressions fortes, qui se sont progressivement construites et confirmées durant le déroulement du voyage, et qui sont en complète opposition avec de ce que les grands médias occidentaux disent de ce pays, depuis plusieurs années, et particulièrement dans la dernière période, avec l'affaire de l'enrichissement de l'uranium et les risques de représailles contre ce pays, pouvant aller jusqu'à la réalisation d'une série de bombardements américains (l'idée d'un envahissement de l'Iran par l'armée américaine n'est pas, pour l'instant, crédible, mais un campagne de bombardements peut faire de nombreuses victimes et de gros dégâts). Ces médias ont nécessairement une influence diffuse au sein de la population des pays occidentaux. A propos de l'Iran, s'est constitué un corps de préjugés, tous négatifs, dont l'existence, dans le contexte actuelle, est dramatique. Je voudrais, modestement, contribuer à établir la réalité de ce pays et surtout de son peuple, et ceci à la demande express des Iraniens rencontrés, qui vivaient eux-aussi dramatiquement ce qui était dit sur eux dans les grands médias occidentaux. En Iran, dans toutes les villes, on reçoit les grandes chaînes de télévision occidentales : CNN, la BBC, Euronews (souvent en anglais et parfois en français) et, de manière plus rare, TV5 Monde. Regardant ces chaînes le soir à l'hôtel, j'ai pu mesurer et vivre le décalage dont je parle, et en souffrir.</p> <p><strong>1. Les raisons et l'organisation de ce voyage.</strong></p> <p>J'avais plusieurs séries de raison à vouloir réaliser un tel voyage, voyage que je voulais faire depuis longtemps, mais que diverses circonstances m'ont empêché de réaliser plus tôt. En particulier : <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> il s'agit du pays où mon père, Arménien d'Iran, est né et a vécu une large partie de sa jeunesse. Quand je suis né moi-même en France, mon père avait encore la nationalité iranienne et j'en ai hérité automatiquement. Je voulais aller sur les traces de mon père et de sa famille et découvrir mon propre pays. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> Je voulais découvrir et comprendre la fabuleuse civilisation perso-iranienne, suivre ses étapes, et me rendre compte de ce qu'il en restait, non seulement dans la beauté de l'architecture et de l'art iranien, mais aussi, et surtout, dans les modes de pensée et de comportement des Iraniens. Pour des raisons que j'ai déjà exposées sur mon site (dans le cadre d'une approche de la mondialité), j'étais et suis encore plus persuadé de l'urgente nécessité de connaître les trajectoires et apports des différentes civilisations. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> Enfin, bien entendu, je voulais savoir et voir, toucher du doigt, ce qu'il en était de l'Iran actuel, face aux préjugés dont j'ai parlé et dans le contexte de risque de guerre. C'est d'ailleurs ce contexte qui m'a décidé d'y aller rapidement.</p> <p>Matériellement, comme je disposais d'un temps limité, je suis passé par un organisme, CLIO, qui présentait de nombreux avantages : il est spécialisé dans les voyages centrés sur l'histoire des civilisations, il réalise chaque année, depuis 14 ans des voyages en Iran et, comme j'ai pu le vérifier, possède, de ce fait, un excellent réseau de contacts dans tout le pays. Sauf à partir seul, CLIO et quelques organismes du même type sont les seuls à organiser des voyages dans ce pays. De fait, il est boycotté par les autres agences de voyage, soit pour des raisons politiques, soit parce qu'elles pensent que peu de touristes sont prêts à faire un tel voyage (l'Iran fait peur...). Cela représentait un incontestable avantage pour nous : il n'existe pratiquement aucun touriste en Iran et les effets, souvent ravageurs, du tourisme, n'existent donc pas. Mais en contrepartie, les Iraniens souffrent d'un effet d'isolement et aimeraient que leur pays soit davantage connu. Donc, un groupe de 24 français, en majorité des retraités, sympathiques et ouverts, la plupart déjà instruits (par des lectures) des éléments de base de la civilisation iranienne, mais en contrepartie nettement moins intéressés que moi par les dimensions politiques, sociales et affectives. Nous étions accompagné, pendant tout le voyage, par une "conférencière" française, qui venait en Iran tous les ans depuis 14 ans, bénéficiant d'un réseau développé d'accueil et de rencontres sur place, et qui, pendant les trajets, dans le car, nous faisais des conférences. La majorité étaient concentrées sur l'évolution historique du pays. Mais elle n'a esquivé aucun sujet. Et en particulier nous a fait trois conférences, très précises, sur l'évolution des religions en Iran et leur organisation actuelle, sur la situation des femmes et sur l'actualité politique.</p> <p>Les impressions que je livre ici sont donc issues d'un mélange entre ce que j'ai moi-même vu entendu, ressenti pendant ces 4000 km, des discussions spontanés avec les Iraniens rencontrés, et des conférences dont j'ai parlé.</p> <p><strong>2. Eléments de cadrage.</strong></p> <p>Quelques éléments de cadrage : <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> L'Iran fait, en superficie, trois fois et demi la France, avec une population d'environ 65 millions de personnes. Il est donc peu peuplé, mais cela s'explique par sa géographie. Grande zone de transit entre l'Ouest et l'Est tout au long de son histoire, matérialisée par les pistes caravanières, on peut distinguer trois parties : o Un grand plateau central, situé en 900 et 1300 mètres, au climat continental (grand froid l'hiver, fortes chaleurs l'été, idéal au printemps), semi-aride (car les nuages sont bloqués par les montagnes), lieu des principales grandes villes. On trouve, sur ce plateau, deux vrais déserts à l'Est du pays. o Des chaînes montagneuses, dont une grande chaîne au Nord, qui sépare le plateau de la mer Caspienne. Téhéran est situé en bordure de cette chaîne, versant plateau. De la ville, on voit les montagnes proches, dont la plus élevé culmine aux alentours de 5600 mètres. Plus la ville s'étend, plus les quartiers périphériques atteignent des zones montagneuses. Et une grande et large chaîne à l'Ouest ; côté frontière avec l'Irak. A l'Est, une troisième chaîne, mais moins élevée, jouxte en particulier l'Afghanistan. Les chaînes du Nord et de l'Ouest sont entièrement situées en Iran. Ce ne sont pas des chaînes frontière. o Enfin les régions situées de l'autre côté des chaînes montagneuses. Au nord, une bande de territoire qui longe la mer Caspienne, au climat humide et tropical, véritable réservoir de production de riz (et de biens agricoles de tout genre) pour l'Iran. A l'Ouest, une zone assez large, qui aboutit donc à la frontière avec l'Irak, avec une double caractéristique : c'est la région d'exploitation et d'exportation du pétrole, avec, pour les besoins internes, des vastes complexes pétro-chimiques. Et c'est aussi une zone fertile qui alimente le reste du pays. De cette très rapide présentation, on peut tirer un enseignement politique et militaire. La majorité du pays est montagneuse. Si, dans son histoire, l'Iran a subi des nombreuses invasions et conquêtes, le pays n'a jamais pu être entièrement soumis. Et les Iraniens ont toujours fini par regagner l'indépendance de leur pays. Par ailleurs, le couplage entre hautes chaînes montagneuses, riches en eau, et plateau central aride, a conduit les Iraniens, très tôt dans leur histoire, a édifié un vaste réseau de canalisations, où circule une eau vive, tantôt à l'air libre, tantôt de façon souterraine, et qui alimente en eau une partie des zones du plateau (en particulier les grandes villes). L'Iran a développé, par nécessité, une véritable civilisation de l'eau. L'eau coulante est partout : dans les jardins des villes, le long de chaque rue, en bordure du trottoir, et bien entendu, sous forme d'irrigation des terres agricoles. Les montagnes font réservoir. On a donc le paradoxe d'un pays semi-aride, voire désertique, sur sa zone centrale, et qui en même temps a su domestiquer la circulation de l'eau, au point de la rendre omni-présente. Dans les jardins par exemple, les canaux font partie intégrante de l'architecture et de l'art iraniens.</p> <p><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> le noyau central de la population iranienne est d'origine indo-européenne. Au départ, il s'agissait de deux peuples de nomades, originaires d'Asie Centrale, qui se sont sédentarisé sur le plateau central, autour de 2000 ans avant JC (on trouve les premières traces explicites des tribus mèdes et perses, sédentarisées sur le plateau à cette époque). Elles ont engendré la civilisation Perse, dont les mèdes ont été les alliés, fournissant en particulier les combattants (civilisation dont l'apogée se situe autour de 600 et 500 avant JC, à l'époque de constitution de l'Empire perse, qui s'étendait de la partie Ouest de l'Inde, jusqu'à la Grèce, l'un des plus vastes empires qui ait jamais existé). Le mot actuel d'Iran a une signification forte (que j'ignorais). Il vient de la langue indo-européenne et du mot Ayryana Vaejo, littéralement : "l"origine des Ariens". Les Ariens ne constituent pas du tout une race - contrairement à l'usage fait par Hitler, mais la localisation d'un peuplement situé en Iran et dans une partie de l'Inde. De manière plus simple, les Iraniens traduisent le mot "Iran" par "gens de l'Est". C'est essentiel à savoir : les Iraniens sont des "gens de l'Est", par nette distinction, en particulier, d'avec les "gens de l'Ouest", c'est-à-dire les Arabes. Ne jamais dire à un Iranien qu'il est Arabe ! L'histoire de l'Iran est jalonnée de conflits avec les populations arabes, en remontant jusqu'à l'époque de la Mésopotamie et en terminant par le conflit Irak - Iran. Pendant une période assez courte, 4 ans après la mort de Mahomet, l'Iran a été attaqué par les arabes, récents convertis à l'Islam, qui ont conquis le pays et importé la religion musulmane. A l'échelle historique, cette domination par l'empire arabe (dont le centre était Bagdad) a été courte, mais elle a eu pour effet d'imposer la croyance en l'Islam, face à la religion dominante à l'époque : le zoroastrisme. Les envahisseurs étaient sunnites. Pourquoi les Iraniens ont-ils choisi le chiisme ? Il y aurait long à dire sur ce sujet ; mais l'un des éléments a été constitué par la résistance des Iraniens à la domination ou à l'influence des Arabes ; En choisissant une branche dissidente de l'Islam et en en devenant le principal foyer d'existence, les Iraniens ont manifesté, à leur manière, leur esprit d'indépendance. Le second "âge d'or" culturel de l'Iran - après la période Perse - se situe autour des années 1200, culture dont on connaît le beauté et au sein de laquelle on trouve explicitement référence à l'Islam. Les Iraniens de l'époque ont, en quelque sorte, opéré une réappropriation de l'Islam, en l'incorporant dans leur propre civilisation (qui était considérablement plus ancienne). On ne peut néanmoins réduire les Iraniens à ce noyau central et majoritaire. Le peuple iranien est composé, depuis de nombreux siècles, d'une myriade d'autres peuples qui ont appris à coexister. On peut citer les Azéris, les Kurdes, les Baloutches (sunnites), le Turkmènes, les Arméniens (chrétiens)... Chacun de ces peuples a droit à un représentant au Parlement. La cohabitation pluri-séculaire se passe relativement bien. Même dans la période la plus radicale - la période Khoméiniste, les croyances et traditions de ces peuples ont été respectées, à la condition, toutefois, de respecter les lois d'Etat, inspirées de l'Islamisme. Le quartier arménien à Ispahan, légué à cette communauté "ad vitam aeternam", du fait de sa forte contribution artistique et artisanale à la construction de cette ville, quartier "auto-géré" par les Arméniens, témoignent de cette coexistence de très longue durée</p> <p><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> enfin, avant dernier élément de cadrage, l'économie. Toute l'économie iranienne est commandée par un principe, qui a fait figure, pour l'Iran, de nécessité : l'indépendance (et l'auto-suffisance). Elle est assurée au plan agricole. Au plan industriel, l'Iran dispose d'un appareil de production conséquent (depuis l'industrie lourde jusqu'aux biens de consommation). Visuellement parlant, l'Iran est un pays moderne, avec un excellente infrastructure routière, des villes très claires dans leur urbanisme et surtout très propres (une étonnante propreté), très peu de pauvreté "visible" parmi les population, simplement mais correctement vêtue. Si l'on devait le classer, on le classerait dans le second monde, dit aussi "pays émergents". Car bien entendu la modernité ne doit pas cacher les zones de pauvreté (particulièrement nettes à la campagne) et les inégalités sociales. L'actuel président a d'ailleurs exploité à fond le thème de la lutte contre la pauvreté et de la redistribution des richesses pour se faire élire. A l'inverse du Brésil, l'industrialisation du pays s'est faite autour de ce principe central d'indépendance et d'auto-suffisance : la majorité des entreprises sont iraniennes et sont centrées sur le marché interne. Certes les produits sont moins sophistiqués et technologiquement avancés qu'en France ou au Brésil, mais ce n'est pas nécessairement un défaut... Cela assure au moins une faible dépendance vis-à-vis des multinationales. Un point frappant : l'absence des firmes américaines ! On peut citer une histoire pittoresque : Coca Cola avait installé une grande usine, pour inonder le marché iranien. Mais, lors de la dégradation des relations entre Iran et Etats-Unis, la firme a du se retirer. Elle a laissée, de fait, aux Iraniens, la technologie de fabrication des contenants. Et quant au contenu, les Iraniens ont inventé un simili Coca. Si vous demandez un Coca dans un café, pas de problème : vous l'aurez, mais un Coca "made in Iran"... Par contraste, je doit dire, l'influence des produits et de la publicité nord-américaine (et plus généralement émanant des grandes firmes mondialisées) m'est apparue flagrante à mon retour en France. Aller en Iran, c'est faire une véritable cure de désintoxication. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> Dernier élément de contexte sur lequel il faut insister : la guerre Irak-Iran, que nous connaissons mal, ici en France. Cette guerre a été déclenchée par Saddam Hussein en 1980, qui pensait pouvoir compter sur l'effet de désorganisation en Iran, du à la chute de Shah et à la révolution khomeiniste et sur une faible motivation à combattre de l'armée iranienne. Saddam pensait gagner rapidement, par une guerre éclair, avec pour principal élément de convoitise : les champs et installation pétrolifères qui sont dans la zone ouest de l'Iran, jouxtant l'Irak précisément et offrant un accès à la mer. L'offensive de Saddam a été explicitement soutenues par tous les pays arabes, et, plus discrètement, mais réellement, par les puissances occidentales. L'Iran s'est alors retrouvé seul contre tous (j'ignore s'il a reçu une aide de la Russie). Il a réussi stopper l'offensive irakienne. Et il s'en est suivi 8 longues années de guerre, assez proche, même si les armes étaient différentes, de la guerre de 1914-18. Dans la dernière phase de la guerre, les moyens humains venant à manquer, les mollahs (qui jouaient le rôle d'agent recruteur) sont allés chercher, dans les petites villes et villages de l'intérieur du pays, les jeunes gens, et ces jeunes, totalement inexpérimentés au plan militaire, ont été placés aux avant-postes et./ou sur les zones minées, en avant front de l'armée régulière. D'où une véritable hécatombe. Cette guerre n'a servi à rien : en 1988, l'armistice est signé, sur la base des délimitations de frontière datant d'avant la guerre. Echec donc pour Saddam, mais aussi pour tous ses alliés. Une guerre aussi sauvage et récente laisse des traces. En particulier, elle a développé trois types de sentiments en Iran : o Un sentiment d'isolement, renforçant le principe, déjà solidement installé, selon lequel "il faut avant tout compter sur ses propres forces", o Bien entendu, un fort sentiment de méfiance vis-à-vis des pays arabes. Il ne faut pas se tromper : au plan des affects, la coupure iraniens / arabes est nettement plus forte que celle entre chiites et sunnites. Une partie de la population iranienne, épuisée par cette guerre, cherche une réconciliation de longue durée avec le monde arabe. Mais elle sait aussi que ce sera difficile. o Enfin, paradoxalement, c'est au cours de cette guerre que le peuple iranien a commencé à rompre avec le régime khomeiniste. Cela peut sembler paradoxal, car une guerre aurait plutôt tendance à resserrer les liens. Mais c'est le comportement des religieux qui a été jugé insupportable par la population. L'épisode de la mobilisation forcée des jeunes gens (voire jeunes enfants) est restée dans les mémoires et symbolise une première montée de haine contre le régime. Dans de nombreux villages et petites villes, en particulier de la partie ouest du pays, j'ai pu voir des grandes affiches, avec des portraits de jeunes gens. Renseignements pris : il s'agissait des portraits des jeunes du village ou de la ville en question, qui étaient morts à la guerre "en martyrs" (et un martyr est supposé aller directement au paradis). On a là la profonde ambivalence de la situation : ces portraits remémorent un épisode particulièrement terrible de cette guerre, et le début de rupture entre le peuple et le régime, mais en même temps rappellent la foi en l'Islam</p> <p><strong>3. Impressions d'Iran.</strong></p> <p>J'en viens à l'essentiel de mon propos : indiquer les principales impressions qui se sont peu à peu forgées dans mon esprit au cours de ce voyage.</p> <p><i>3.1. L'art de vivre.</i></p> <p>Si j'essaie de restituer l'élément qui m'a le plus frappé dans le peuple iranien, j'en viens à celui-ci : l'art de vivre. L'art de vivre bien. Non pas du tout par recherche de la richesse, mais par facultés de savourer tous les instants de la vie, dans une relative sérénité et lenteur, dans un goût indéniable de la beauté, sous toutes ses formes, dans l'ouverture amicale à autrui, dans l'offre du thé et les conversations. Cet art de vivre remonte à loin. Je n'ai pas le temps ici d'indiquer comment il a commencé à se condenser dans le zoroastrisme (Zoroaste, plus connu en Europe sous le nom de Zarathoustra, a vécu au 6ème siècle avant JC, mais la religion qui se réfère à lui ne s'est diffusée que de manière progressive dans le pays) et la manière particulière dont le peuple iranien interprète le chiisme. Mais l'exemple qui me semble le mieux témoigner de ce goût et de cet art de vivre est l'occupation des jardins publics. Ceci est connu : ces jardins sont magnifiques. Et dès que la chaleur monte, ils sont un lieu de fraîcheur, grâce aux arbres et aux fontaines. Or ces jardins sont entièrement appropriés par le peuple. Il y en a dans toutes les villes. Il y a toujours une pelouse, étonnamment verte et bien entretenue (la propreté est partout en Iran, jusque dans les maisons des plus pauvres). Non seulement il est permis de marcher sur la pelouse, mais elle est un véritable lieu de vie : on s'y allonge, on mange en famille, une nappe posée sur l'herbe, laquelle fait office de tapis. Les enfants jouent librement tout autour. Des conversations se nouent. Certains jardins ont des sortes de cafés où l'on peut s'asseoir dans des divans, boire du thé ou du café, fumer du narguilé. Je ne suis pas ici dans l'anecdote, mais dans un élément essentiel de la vie des Iraniens. Pendant qu'en France, on se précipite devant la télévision, les Iraniens sont dehors, dans les jardins ou dans les rues. Dans cet art de vivre, j'inclue un goût pour la beauté, nullement réservé à des classes culturellement bien dotées, mais général. Tout iranien aime ce qui est beau. Dans la plus petite maison, dans un village de l'intérieur, on trouvera un minuscule jardin, parfaitement entretenu, une terrasse et des coussins. C'est sans doute l'art de la mosaïque et des miniatures persanes qui exprime le mieux ce goût : une beauté dans la finesse des motifs ou des traits, dans la géométrie des formes, dans l'assemblage des couleurs. Chez la moindre femme, même celles qui sont prisonnières d'un Tchador, vous verrez s'exprimer une subtile coquetterie, la manière de souligner le contour des yeux ou de laisser des mèches de cheveux s'échapper... Je ne veux pas dire par là que tout le peuple iranien est artiste. Il serait absurde de le dire. Mais tous apprécient la beauté de l'art qui leur a été légué et se l'approprient. Par exemple, l'immense place centrale d'Ispahan, sans doute un des plus beaux lieux du monde, est un espace de vie populaire, doublé par le bazar qui jouxte la place. J'espère que cela durera et dans quelques années, cette place ne sera pas infectée par des masses de cars de touristes ! Si on ne comprend pas cette philosophie de l'art de vivre, on ne comprend rien aux Iraniens, dans tous les domaines.</p> <p><i>3.2. Croyant, mais non religieux ; religieux, mais sans église ?</i></p> <p>J'en viens à un élément qui figure au premier plan des stéréotypes concernant l'Iran. On croirait, au vu des certains reportages ou images, que les Iraniens sont un peuple largement aliéné par la religion, un peuple triste et fanatique, vivant au diapason de ses dirigeants. Ceci est radicalement faux. C'est exactement l'inverse qui est vrai. De ce que je connais des différents pays du monde, je n'ai jamais ressenti une telle coupure, une telle distance volontairement entretenue entre le peuple et la structure politico-religieuse qui dirige l'Etat et tente (de moins en moins) de contrôler la population. Je partirai de la structure dictatoriale politico-étatique. La force dominante est l'église chiite. La grande différence entre chiisme et sunnisme est que les chiites ont développé leur influence autour d'une véritable structure hiérarchisée, une véritable pouvoir ecclésiastique, qui n'est pas sans rappeler ce qui a pu exister chez nous, à l'époque de Moyen Age. L'Eglise chiite - car le mot "Eglise" peut être utilisé - est structurée par niveaux hiérarchiques. Au bas de la structure se trouve des fidèles, qui occupent un emploi ordinaire au sein de la société civile, mais sont en même temps dévoués au régime. Une bonne partie d'entre eux ont été dans les premiers rangs durant la guerre Iran-Irak et ils se regroupement dans une myriade d'association d'anciens combattants ou de handicapés. On ne connaît pas leur nombre exact. Ils seraient environ 100 000. Ce nombre peut sembler important, mais il faut le rapporter aux 65 millions d'Iraniens. Ce sont eux qu'on voit, à la télévision, lors des manifestations de soutien au régime. Et ils sont dangereux, car, infiltrés dans la population, ce sont des "mouchards" potentiels. J'ignore si le peuple iranien a inventé un système de signes qui permet de les distinguer, mais le passant que j'étais était incapable de les identifier. Juste au dessus viennent les mollahs. Ils portent un vêtement caractéristique qui les identifie aussitôt. Les mollahs à turban blanc sont des mollahs ordinaires, choisis en général en fonction des années d'études passées dans les écoles coraniques. Les mollahs à turban noir sont censés pouvoir de réclamer d'une ascendance remontant à Ali (gendre de Mahomet et figure centrale de l'Islam chiite). Les mollahs seraient quelques centaines (mais aucun chiffre fiable n'existe). Comme je l'ai indiqué, ils sont presque invisibles dans les lieux publics. En 2 semaines et 4000 km, je n'en ai vu que trois. Au-dessus des mollahs, les Ayatollah, strate supérieure, censée avoir poussé loin ses études et sa méditation coranique. On peut les assimiler à nos évêques. Je n'ai pas réussi à obtenir leur nombre. Parmi les Ayatollah, se distingue un groupe privilégié, qui jouit d'un prestige encore supérieur : les grands Ayatollah. Ils sont une vingtaine. Leur caractéristique est que tous peuvent prétendre figurer dans la descendance direct d'Ali. Enfin, au sommet de la pyramide : le Guide Suprême, aujourd'hui Ali Khamenei, qui a remplacé Khomeini à sa mort. Ajoutons que cette Eglise, comme ce fut aussi le cas en France , est traversée par des conflits de pouvoir et de légitimité. Derrière une façade unifiée, on peut dire que plusieurs "familles", c'est-à-dire plusieurs lignées familiales, descendant réellement ou fictivement d'Ali, se disputent en permanence la prééminence ; Cela peut aller jusqu'à des vagues d'assassinats. Comment et sur quoi agit cette structure dictatoriale ? Elle a d'abord une fonction de quadrillage de la population. Indiquons que cette fonction est de moins en moins efficace. Elle joue avant tout négativement ; par un pouvoir de dénonciation de "mauvaises moeurs" ou d'"idées séditieuses", sachant que tout l'appareil judiciaire est tenu par les religieux. Mais elle n'a plus aucun pouvoir d'entraînement ou de mobilisation. Elle a ensuite et surtout un pouvoir de contrôle du pouvoir politique. Même si le gouvernement actuel, à commencer par le nouveau président de la République, sont des laïcs, et même si coexiste, avec le pouvoir religieux, un système "démocratique", il n'est en secret pour personne que le pouvoir politique élu est étroitement et visiblement contrôlé par la hiérarchie religieuse, au travers d'une série de commissions ad hoc. On sait comment la commission chargé d'avaliser la candidatures, à éliminé la grande majorité des candidats progressistes aux dernières présidentielles. Quelques mots sur Mahmoud Ahmadinejad : son élection, réalisée sans doute par défaut, a été une surprise pour tout le monde. En fait, il est l'émanation d'un nouveau parti politique, créé il y a trois ans, à l'occasion de la campagne électorale pour la mairie de Téhéran. Ce mouvement a gagné les élections et désigné Ahmadinejad comme maire. Ce parti vise à concilier trois tendances : <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> un strict conservatisme religieux, et donc une allégeance à Khamenei, <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> un technocratisme moderniste, qui n'est pas sans reprendre certains projets du Shah. Le gouvernement formé par le Président est un gouvernement de technocrates. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> enfin un populisme de façade, de préoccupations vis-à-vis de la situation des pauvres, qui se marque dans la façon dans le Président s'habille. Populisme de façade, mais qui n'est pas sans constituer un point fort de la religion islamique : sa capacité à se préoccuper des problèmes de pauvreté et à développer, à cette occasion, une multiplicité d'associations d'aide aux populations démunies. C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles les "pauvres" ne sont pas visibles en Iran, moins qu'à Paris ! Pratiquement pas de mendiants dans les rues, pas de grandes zones de bidonvilles comme à Sao Paulo ou Lima... Les gens peuvent être habillés très simplement, mais toujours de façon correcte. La pauvreté se voit surtout à la campagne.</p> <p>Cette description de la structure politico-religieuse dictatoriale peut donner l'impression d'un pouvoir fort. C'est exactement l'inverse qui est vrai. Le peuple, en nette majorité, les déteste. Le peuple iranien est un peuple cultivé, indépendant et fier. Il a vite compris qu'il avait affaire à une nouvelle dictature et n'entretient aucune illusion sur ses dirigeants. Qui plus est, au fil du temps, il a su construire un véritable rapport de force. Les religieux et les policiers interfèrent très peu dans la vie quotidienne des iraniens et dans l'occupation des lieux publics (la rue, les jardins, les cafés, etc.). Ils se font discrets, se tiennent à l'écart. Je ne parle pas ici de la surveillance ou de l'emprisonnement des opposants politiques à propos desquels je ne dispose d'aucune information autre que celles qu'on obtient en Europe. Je parle vraiment de la masse du peuple. Il s'est créé comme un espace vide entre la structure dictatoriale et la vie du peuple. La rue est libre. Elle est libre dans la manière de s'y mouvoir, mais aussi dans l'usage de la parole. J'ai discuté avec de nombreux iraniens et iraniennes, qui venaient spontanément à ma rencontre. Pas à un seul moment je n'ai senti le moindre signe de peur ou d'auto-censure chez eux. Le peuple iranien a largement pris le pouvoir sur sa manière quotidienne de vivire, et, sur les points les plus sensibles, il pratique la chaise vide, la résistance passive. Cas les plus flagrant : les mosquées sont au trois quart désertes. Comme il est possible, pour un non-musulman, d'y entrer, j'ai pu le vérifier maintes fois, même lors de la prière du vendredi. L'immense mosolé construit à la gloire de Khomeiny est un échec retentissant. L'immense salle centrale est déserte, au point que les autorités ont décidé de couper la salle en deux, pour qu'elle fasse moins vide... Alors le peuple iranien est-il religieux ? C'est une question difficile à cerner. J'apporterai trois impressions à ce sujet : <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> il me semble que le peuple iranien, celui, majoritaire, mais non unique, qui est de confession chiite, est réellement croyant. Cela se manifeste dans des fêtes essentielles, les seules qui mobilisent du monde : les anniversaires des 11 (ou 7 selon la croyance) descendants directs d'Ali, autour de leur tombeau. Ce sont ces descendants et uniquement eux qu'on appelle "imam". La religion chiite dit qu'il en existe un douzième, secrètement disparu, mais qui reviendra dans un rôle de sauveur. A noter, au passage, que l'auto-flagellation n'est plus pratiquée en Iran (à l'inverse de l'Irak). Mais entre être croyant et être inféodé à un appareil religieux, il existe une grande différence, et, dans le cas de l'Iran, une différence croissante. On peut dire qu'on a un peuple croyant, mais de moins en moins religieux. Une sorte de retour du rapport direct à Dieu. Ou bien on pourrait l'exprimer d'une autre façon : un peuple religieux, mais qui rejette l'Eglise (l'appareil, le dispositif de pouvoir) qui prétend l'incarner. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> La seconde, mais qui nécessiterait des études poussées, est que le peuple iranien reste bien représenté, dans sa philosophie pratique, par le zoroastrisme, seule religion qui ait pris son essor (à partir du 6ème siècle avant JC) sur le sol iranien. Religion optimiste, non moralisatrice, ni culpabilisatrice, rejetant l'idée de péché originel, religion de plaisir de vivre, du développement de la réflexion personnelle et du respect des grandes forces naturelles, tout en étant (déjà !) monothéiste. J'ai l'impression que, dans le peuple iranien, s'est forgé, au fil de l'histoire, une interprétation de l'Islam qui reste marquée par cette philosophie pratique. Et c'est totalement à l'inverse de l'image triste et noire que l'on donne en général des Iraniens, quand on les présente comme des fanatiques religieux (ce qui est une absurdité sans nom). <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> Enfin, il faut tenir compte d'un trait majeur du peuple iranien : son indépendance. C'est un peuple qui a subi un nombre considérable d'invasion et de guerre, qui a été plusieurs fois "soumis" à une puissance étrangère, qui se sent dans un environnement désormais hostile (hostilité des pays occidentaux, hostilité ancestrale des pays arabes), qui a toujours réussi à se libérer et qui a donc assimilé, en profondeur, le principe "comptez d'abord sur des propres forces". Ce qui est valable dans les relations extérieures, l'est dans les relations internes. Le peuple compte avant tout sur lui-même. Les autorités politico-religieuses agissent, mais à distance, à l'écart. Un exemple : lorsque Ahmadinejad a été élu, il a voulu opérer une reprise en main du peuple, en particulier sur le plan des mœurs. Echec retentissant. Trois semaines après, il a fait machine arrière, et les choses sont redevenues comme avant. Bien entendu, nous sommes là dans un équilibre instable, qui ne pourra pas durer éternellement. Ce qui impose ce type de compromis, c'est l'absence de toute solution au plan du pouvoir politique élu, et donc l'échec des réformateurs. Je n'ai pas d'avis ni d'informations particulières concernant l'influence de l'opposition démocratique et laïque au régime ; La seule chose certaines que les religieux ont à chaque fois complètement faussé le jeu électoral. Quant à l'ancien président, considéré comme réformateur, il joue un jeu trouble. On ne doit oublier qu'il fait partie de la caste des grands dignitaires, et actuellement, il dirige l'une des commissions importante au sein du système politico-religieux.</p> <p><i>3.3. L'oppression des femmes : l'habit ne fait pas le moine.</i></p> <p>Il est incontestable que l'oppression des femmes figure comme un problème majeur de l'Iran. J'espère montrer qu'il est moins aigu que dans bien des pays arabes musulmans, mais néanmoins bien réel. Là aussi, je ne me reposerai que sur des impressions de voyage. Et sur deux éléments en particulier : l'habit et le comportement.</p> <p>Le port des vêtements par les femmes est régi par une loi, étatique, qui exprime un principe islamique : les femmes ne doivent pas, dans les lieux publics, montrer des parties dénudées de leurs corps, mis à part le visage et les mains. Pas même les chevilles. Cette loi s'applique à toutes les iraniennes, qu'elle que soit leur confession, et elle s'applique aussi aux touristes. Mais quelle est la réalité ? Il me semble qu'il existe deux grandes coupures parmi les femmes : <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> une coupure générationnelle, <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> une coupure "grandes villes" et campagnes. Pour l'essentiel, les femmes qui ont autour de la quarantaine et plus, qui ont "accompagné" la révolution khoméneiste et restent les plus marquées par les traditions, portent le Tshador, vêtement de couleur noir (ou brune), qui ressemble à s'y méprendre aux vêtements des bonnes sœurs en France. Elles portent le Tshador avec naturel et aisance. Elle le garde chez elle (alors qu'aucune loi ne les y oblige). C'est comme s' il faisait partie d'elle-même. C'est lié à une religiosité nettement plus marquée que chez les jeunes, mais aussi aux rapports sociaux de domination, de longue date instaurés au sein du foyer entre hommes et femmes. Je veux dire par là qu'il ne faut inférer, du port du Tchador, une particulière soumission au pouvoir politico-religieux. Ces femmes peuvent être toute aussi rebelles que les autres si les autorités prétendent interférer dans leur manière de vivre et leurs opinions. Et comme nous sommes dans une économie où l'artisanat familial tient une grande place, ce sont souvent elles qui fabriquent les produits (ce sont elles qui font les tapis par exemple), alors que le mari joue le rôle de commerçants. Elles sont un élément essentiel de l'économie iranienne et le savent. Les femmes des nouvelles générations, depuis les lycéennes jusqu'aux femmes d'environ 35 ans, ont une autre manière de se vêtir et un autre comportement. Si je laisse de côté le cas des lycéennes (je vais y revenir), il existe une tendance progressive, mais forte, à laisser tomber le Tchador et à interpréter la loi sous forme du port d'un foulard et du pantalon. Là toutes les couleurs et toutes les astuces sont possibles. Le foulard, en particulier, devient un élément distinctif, un élément de mode. Et toutes les femmes s'arrangent pour le porter en faisant apparaître leurs magnifiques cheveux noires. Je me suis dit - mais je n'en suis pas sûr ! - qu'il devait exister entre elles une sorte de défi : c'est à qui saurait utiliser le foulard de manière à montrer la pus grande partie possible de ses cheveux ! Les pantalons sont de toutes les sortes, comme en France. Manifestement, le pouvoir politico-religieux a renoncé à lutter contre ce mouvement de fond. Mais il est vrai qu'il est avant tout développé dans les grandes villes (Shiraz et Téhéran sont à la pointe de ce mouvement). Le cas des lycéennes est très intéressant. Elles n'ont pas le choix. Le port du Tshador leur est imposé. Et on voit donc, par exemple lors des visites des bâtiments ou des musées, des nuées de "corbeaux" (c'est ainsi qu'elles se qualifient !) s'abattre dans ces lieux publics, avec toutes la vivacité de la jeunesse. Or, cette fois-ci, l'impression vraiment très forte que j'ai ressenti est qu'elles vivaient le port du Tchador comme une camisole de force, et qu'il ne faudrait qu'un signe politique (ou une révolte ?) pour qu'elles l'abandonnent aussitôt. Il faut dire que lycéennes, voire étudiantes, qui portent le Tchador, sont presque toutes en jean sous leur robe. Et elles sont capables de sortir soudain, de dessous cette robe, des camescopes ultra-modernes pour vous filmer ! J'en viens au second élément, plus important encore : le comportement pratique des jeunes générations (jusqu'à 35 ans environ). Ici surprise complète pour moi. De mon expérience du Maroc et surtout de ce qu'on avait pu me dire sur certains pays arabes, je pensais que les femmes se tenaient à l'écart des hommes, voire n'osaient pas les regarder en face. En Iran, c'est tout l'inverse. Chaque fois que notre car s'arrêtait dans un lieu, et vu le très faible nombre de touristes en Iran, nous étions tout de suite l'attraction. Les premières à nous faire "hello" avec de grands gestes et sourires étaient les lycéennes. On était aussitôt entourés de "corbeaux" rayonnantes et rieuses, qui nous regardaient droit dans les yeux et nous posaient des tas de questions (et il en avait toujours une qui savait assez d'anglais pour jouer le rôle de traductrices). Bien entendu, elles nous bombardaient de photos et en retour acceptaient avec plaisir d'être photographiées. Les jeunes filles étaient plus discrètes, mais s'approchaient aussi de nous, et c'est avec elles qu'on avait les conversations les plus soutenues. Un certain nombre de ces jeunes filles, des étudiantes en général, étaient seules et se déplaçaient en toute liberté. Voici bien la surprise : des femmes qui vous regardent droit dans les yeux, qui vous accostent, qui discutent, qui rient... Je ne veux absolument pas dire que les femmes iraniennes ne subissent des rapports d'oppression et de discrimination. Ce serait d'ailleurs ridicule de tenir de tels propos. Je veux simplement signifier qu'il existe en Iran, dans les lieux publics (plus dans l'espace privé ?), un mouvement presque irréversible d'émancipation vis-à-vis des formes traditionnelle et rétrogrades d'oppression. Et l'expression, parmi les jeunes générations, d'une vraie joie de vivre, d'une vitalité expressive qui fait chaud au cœur.</p> <p><i>3.4. Le risque de guerre ?</i></p> <p>Fait curieux : pour entendre parler de l'affaire du nucléaire iranien et des risques de guerre (ou du moins de bombardements), il faut, soit être à l'extérieur de l'Iran, soit écouter les informations diffusées par les grandes chaînes occidentales. Il n'existe absolument aucun signe visible, ni aucun propos qui indiqueraient que le peuple iranien se préparerait à une guerre. Personne ne nous en a parlé. Je ne doute pas que le pouvoir politico-religieux fasse des préparatifs, qu'il achète des armes à l'Union Soviétique, etc. Mais, une fois en Iran, on n'en sait pas plus qu'en France, du moins lorsque l'on ne fait qu'un simple voyage. Pour l'instant, le peuple se sent peu concerné. Il faut malgré tout revenir sur certains points essentiels : <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> les Iraniens, toutes opinions politiques et croyances confondues, se sentent et se vivent de longue date, comme un peuple isolé, au sein d'un monde relativement hostile. Ils n'ont en particulier, non seulement aucun lien d'alliance avec les pays occidentaux qui manifestent, depuis le renversement du Shah, une hostilité latente ou ouverte (seul l'Allemagne et le Japon ont des échanges commerciaux notables, du type : pétrole contre biens d'équipement), mais surtout une grande défiance vis-à-vis de leurs proches voisins, les pays arabes. Paradoxalement, les Américains, dans leur grande sagesse stratégique, leur ont rendu un fier service : être définitivement débarrassés de Saddam et du parti Baas, a une signification forte pour les Iraniens, après 8 années d'une guerre terrible. Et de même, le fait que le pouvoir des Talibans soit tombé est aussi un grand ouf de soulagement. L'étau s'est donc desserré de ce point de vue. La religion ne passe pas avant l'histoire. Je veux dire par là que le fait qu'une partie des Irakiens et des Iraniens partagent la même religion chiite n'induit pas automatiquement des bons rapports. On peut simplement penser qu'il facilitera un retour à des situations normales de bon voisinage. On peut remonter très loin dans l'histoire de ces deux pays, on retrouvera toujours des affrontements : depuis les conflits avec l'ancienne Mésopotamie (et donc Babylone), jusqu'à la guerre de 8 ans, en passant par la domination arabe imposée à l'époque où la capitale du Kalifa était Bagdad. Les Iraniens souhaitent profondément entrer dans une période de paix et de réconciliation, en particulier avec l'Irak. Il est possible que quelques "fous" au niveau du pouvoir politico-religieux aient des visées expansionnistes sur l'Irak. Mais je n'en ai vu aucun signe. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> Du fait de cet isolement, et aussi du fait de la fierté d'être les héritiers d'une grande civilisation, les Iraniens recherchent l'indépendance, voire l'auto-suffisance dans tous les domaines. A l'inverse du Brésil, par exemple, ils ont modernisé leur appareil productif et leurs (remarquables) infrastructures, avec une très faible implication de firmes étrangères. Et leur agriculture est avant tout orientée vers le marché intérieur. Il est dès lors possible que le peuple soutienne son président sur un point précis : l'indépendance dans le nucléaire. Mais ce serait plus par une sorte de réflexe politique que par un intérêt pour cette question. On peut d'ailleurs se poser la question : pourquoi l'Iran aurait-il besoin du nucléaire ? S'il est vrai que Ahmadinejad tient des propos absolument fous et dangereux sur Israël, pour des raisons qui m'échappent, les Iraniens, "gens de l'Est", sont loin, non seulement physiquement, mais surtout mentalement d'Israël. Il n'existe aucun contentieux, ni présent ni passé. Et même si on peut le regretter, les Palestiniens sont loin eux aussi. Ils n'ont pas d'histoire commune. <br /><img src="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> Enfin, on ne peut exclure qu'une guerre soit lancée, par les Américains, avec ou sans caution de l'ONU. Pour l'instant, je ne vois pas d'autres possibilités qu'une vague de bombardements. Mais les Américains peuvent faire mal, s'ils bombardent, non seulement les sites nucléaires, mais les installations industrielles et les infrastructure. Il n'est pas besoin d'être un grand devin pour savoir que les Iraniens, toutes opinions confondues, feront face. Ce serait cette fois-ci un grand service que les Américains rendraient...au pouvoir dictatorial en place à Téhéran !</p> <p><i>Les photos pouvant accompagner ce texte se trouvent sur le site perso de Philippe Zarifian : <a href="http://perso.wanadoo.fr/philippe.zarifian" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://perso.wanadoo.fr/philippe.za...</a></i></p></div> L'EXPORTATION DE LA REVOLUTION ISLAMIQUE AVEC L'ARMEE DE JERUSALEM http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article380 http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article380 2006-03-06T15:52:00Z text/html fr David Hassan Abassi Depuis sa création, la République Islamique d'Iran (R.I.I.) a annoncé l'exportation de la révolution islamique. Une grande propagande internationale a donc débuté afin d'attirer le maximum de fidèles. Pour mener à bien cette entreprise, plusieurs livres sont publiés en une dizaine de langues différentes et on édite plusieurs ouvrages qui parlent de l'internationalisme islamique et avantages probables à devenir martyr pour la révolution islamique ! Dans le même temps, (...) - <a href="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?rubrique62" rel="directory">Iran</a> <div class='rss_texte'><p>Depuis sa création, la République Islamique d'Iran (R.I.I.) a annoncé l'exportation de la révolution islamique. Une grande propagande internationale a donc débuté afin d'attirer le maximum de fidèles. Pour mener à bien cette entreprise, plusieurs livres sont publiés en une dizaine de langues différentes et on édite plusieurs ouvrages qui parlent de l'internationalisme islamique et avantages probables à devenir martyr pour la révolution islamique ! Dans le même temps, ils ont commencé la propagande médiatique en utilisant tous les moyens nécessaires pour arriver à leur but. Ils ont créé une armée qui accueille des volontaires du monde entier pour être entraîné et devenir une milice militaire et idéologique. On nomme cette armée Badre qui devient par la suite Ghods (Jérusalem). Une grande partie des membres de cette armée, environ 400 000 personnes d'origine iranienne et habitant en Iran, était opposée à Saddam Hussein. De plus, les volontaires du monde entier de cette armée était sous le commandement directe du guide spirituel iranien et entraîné par l'armée de Basidj et l'armée de Pasdaran (l'armée de la révolution islamique).</p> <p>Après l'idée d'exportation du terrorisme islamique, la R.I.I. a utilisé tous les moyens pour faire avancer sa politique dans le but d'éliminer et terroriser ses opposants installés en dehors du pays. Alors que plusieurs assassinats politiques étaient commis hors de ses frontières, de multiples procès ont été engagés. Ceux qui étaient plaidés devant les tribunaux ont prouvé et jugé l'implication de la R.I.I. dans les assassinats politiques. A l'exception des opposants qui étaient victimes de la R.I.I., les Ayatollahs iraniens ont utilisé leur armée de Jérusalem internationale islamiste pour faire des actes terroristes contre les intérêts d'autres nations pour accroître leur politique internationale.</p> <p>Dans le même temps, l'Arabie Saoudite, gardien des lieux saints islamiques a également créé des mouvements pour concurrencer l'Islam chiite des Ayatollahs. Ils étaient déjà implantés dans le monde entier par le biais de leurs mosquées et leurs Madrassas (écoles coraniques). C'est à ce moment que l'histoire d'Al-Qaida commence à travers le monde...</p> <p>Jusqu'à il y a huit ans, la R.I.I. était presque unie et ses problèmes intérieurs étaient peu nombreux mais dés 1997 et l'élection de Khatami à la présidence du pays, les problèmes intérieurs vont s'aggraver et augmenter pour arriver même aux services de renseignement, au parlement, aux médias et à plusieurs instances. Il y avait deux chemins ouverts : celui des extrémistes généré par le guide spirituel et celui qui prônait une idée de changement profond et une modernisation gérée par la jeunesse et surtout par les femmes et les étudiants.</p> <p>Déjà dans les années 90 lorsque Rafsandjani est devenu Président de la R.I.I., la première opposition intérieure des étudiants iraniens s'est développée contre le pouvoir politique avec le journal Payam Daneshjoo (Messages des Etudiants) dont le rédacteur en chef Heshmat Tabarzadi était un ancien rescapé de la guerre irano-irakienne et le frère de deux martyrs et anciens fidèles de la R.I.I. Il deviendra le premier leader contre la R.I.I. dans le pays. Son journal est interdit avant que Khatami soit président et alors que Rafsandjani est au pouvoir. Tabarzadi va continuer son combat, créer plusieurs publications qui seront interdites. Il sera agressé, emprisonné et à ce jour il est condamné à 14 ans de prison avec plusieurs de ses amis. Il est également inculpé dans d'autres dossiers. C'est à la suite du mouvement de Tabarzadi que d'autres mouvements individuels vont voir le jour par le biais des journalistes et écrivains, d'anciens fidèles de la R.I.I. comme Akbar Ganji, Said Hajariyan, Ashkavari, Kadivari, le ministre de l'Intérieur Nouri, le ministre de l'Orientation Islamique Mohajenari et même Karabaschi, maire de Téhéran, arrêté et emprisonné. Cette idée de modernisation et la révolte des anciens fidèles de la R.I.I. va durer durant deux périodes du mandat de Khatami.</p> <p>Khatami lui-même ne pouvait pas arrêter la machine des intégristes qui interdisent les journaux, qui emprisonnent les journalistes et écrivains, qui tuent les opposants au sein du pays. Il avait utilisé l'un des slogans que j'avais publié en 1996, les « 10 principes », mais la société civile va céder à la pression du guide spirituel : Khatami dira qu'il est pour une « société civile islamique » !? Une société civile islamique, "une salade" que personne ne peut expliquer alors que la société civile que j'ai proposé en 1996, grâce à Internet et le satellite, va être étendue en Iran. Beaucoup de journaux iraniens, ennemis de notre pensée laïque, ont avoué que nombre de ces pensées laïques étaient la cause officielle de la volonté de changement et de modernisation pour l'Iran. Le Docteur Aghajari, professeur à l'université, rescapé de la guerre irano-irakienne et ancien fidèle des ayatollahs a été arrêté et condamné à mort en 2000-2001 car il avait seulement cité quelques-unes de nos idées laïques concernant la laïcité et le livre « Rationalisme et la religion ». Alors que le Docteur Aghajari est condamné à mort, la R.I.I. sous la pression internationale ne peut exécuter la sentence et le libère il y a quelques mois.</p> <p>L'histoire de la désignation d'Ahmadinejad comme nouveau président de la R.I.I. signifie que c'est l'armée de Jérusalem qui prendra officiellement le pouvoir en Iran. Déjà le patron de la justice iranienne, l'ayatollah Sharoudi, d'origine irakienne et l'un des guides de cette armée, est à la tête de la justice du pays alors que le parlement est entre aux mains des dizaines de généraux de cette armée. Ahmadinejad lui-même en était le chef, les trois pouvoirs (judiciaire, exécutif, législatif) étant le monopole du guide spirituel Ali Khamenei. L'armée de Jérusalem a collaboré avec les Américains contre les Talibans et s'est bien implanté en Afghanistan. En Irak, cette armée est présente par centaines de milliers et c'est elle qui gère la plupart des villes chiites. Le premier ministre d'Irak et son vice-premier ministre, comme beaucoup de ministres et responsables irakiens, sont des fidèles et des alliés de la R.I.I. Les Américains ont avoué qu'ils étaient en Irak à cause des mauvaises informations données par Ahmad Challapi, vice premier ministre irakien qui collabore avec eux depuis 35 ans. Les Etats-Unis ont déclaré que cet homme était un agent de la R.I.I. et les multiples tentatives pour le tuer ont jusqu'à présent échoué. Il est très difficile de l'atteindre car, comme la plupart des chefs du gouvernement irakien en Iran, il a plusieurs bureaux et domiciles.</p> <p>Au Liban, le plus grand parti armée, le Hezbollah, géré par l'ayatollah Sheikh Hassan Nasrallah a été entraîné par l'armée de Jérusalem. Le Hezbollah est donc une branche de l'armée de Jérusalem. Ce sont toutes des milices et des sections de l'armée de Jérusalem implantées dans d'autres pays comme en Afghanistan, Irak ou au Liban et bien implantées sous le nom d'étudiants, de commerçants, d'hommes d'affaires, de professeurs à l'université en Europe, Amérique, Afrique ou dans les ex-pays de l'union soviétique. Dès que la R.I.I. reçoit des pressions internationales, elle active cette armée pour mener à bien ses buts.</p> <p>Plusieurs fois nous avons été les témoins de l'inscription de fidèles prêts à faire des actes kamikazes. Il y a quelques semaines une déclaration officielle a été publiée dans une revue en persan gérée par l'ayatollah Mesbah Yazdi, l'un des guides de l'armée de Jérusalem, pour inscrire les noms des individus qui sont prêts à faire des actes kamikazes n'importe où dans le monde. L'armée de Jérusalem n'est pas seulement un mouvement chiite iranien, elle est internationale et des musulmans sunnites, wahhabites et d'autres tendances la composent. Une partie des membres de ce mouvement sont des musulmans du nord de l'Afrique et de l'Afrique même, du Proche et du Moyen-Orient, d'Egypte, d'Arabie Saoudite et du Yémen et tous ne sont pas chiites. Et parmi eux, il y a des citoyens occidentaux et des ayatollah européens.</p> <p>Même après la chute des Talibans en Afghanistan et malgré la présence de la R.I.I. avec les Américains, une grande partie des membres d'Al-Qaida et également les enfants de Ben Laden ont été accueilli par l'armée de Jérusalem en Iran. Eléments que le ministre des renseignements iraniens a avoué en disant qu'ils seraient jugés. Mais il est très probable que les rescapés d'Al-Qaida sont sous la direction de l'armée de Jérusalem. C'est pour cela qu'à chaque fois qu'il y a des pressions sur la R.I.I. comme par exemple, sur le programme nucléaire, nous sommes témoins d'actes terroristes, d'attentats ou de propagandes qui viennent aussi d'Al-Qaida et qui ne servent que la R.I.I.</p> <p>Les droits de l'Homme ont trop souvent été oubliés en faveur du pétrodollar. Pour avoir le pétrole iranien et le marché de ce pays, on a oublié que l'on traitait avec un monstre avec qui la terreur et la tricherie sont des affaires de tous les jours. Le dernier exemple est la désignation d'Ahmadinejad comme président. Alors qu'à peine un million de personne ont voté pour lui, ce sont 17 millions de voix favorables qui lui ont été accordées. Un résultat controversé qui suscite la contestation des autres candidats (pourtant de grands religieux de la R.I.I. depuis sa création), sur la tricherie lors de cette élection. Tout récemment, le général Jazayeri, membre du Pasdaran et un des chefs de l'armée de Jérusalem en Iran a déclaré que la position de l'Iran dans le monde est depuis plusieurs années sur la défensive. Alors, avec l'élection du nouveau président Ahmadinejad, l'Iran doit devenir offensif dans le monde entier pour pouvoir marquer nos points. La terreur et la torture règnent tous les jours dans la société et les prisons iraniennes. Et si rien n'est fait pour faire cesser les activités de ce monstre, le danger sortira toujours des frontières de la R.I.I. et d'autres vies seront menacées quand ils voudront mettre la pression.</p> <p><i>David Hassan Abassi, homme politique iranien, est historien et journaliste et réfugié à Paris</i></p></div> L'IRAN AURA-T-IL LA BOMBE ? http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article260 http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?article260 2005-07-14T22:00:00Z text/html fr Olivier Makepeace Des rives de la Mer Caspienne à celles du Golfe, toute la partie ouest de l'Iran n'est qu'accumulation de richesses naturelles incommensurables. Le contraste avec l'Irak voisin est saisissant, malgré la similitude des énormes réserves de pétrole et de gaz. Car l'Iran jouit d'un bien encore plus précieux, dont il a su tirer la quintessence. De l'eau, des terres fertiles, un réseau d'irrigation dense, du soleil et un peuple laborieux et (...) - <a href="http://la-gauche-cactus.fr/SPIP/spip.php?rubrique62" rel="directory">Iran</a> <div class='rss_texte'><p>Des rives de la Mer Caspienne à celles du Golfe, toute la partie ouest de l'Iran n'est qu'accumulation de richesses naturelles incommensurables. Le contraste avec l'Irak voisin est saisissant, malgré la similitude des énormes réserves de pétrole et de gaz. Car l'Iran jouit d'un bien encore plus précieux, dont il a su tirer la quintessence. De l'eau, des terres fertiles, un réseau d'irrigation dense, du soleil et un peuple laborieux et courageux : il n'en faut pas plus - ni moins - pour moissonner le blé deux fois l'an.</p> <p>L'Iran a tout pour devenir un paradis. Serait-il privé d'hydrocarbures comme la France qu'il n'aurait aucune peine à assurer son indépendance énergétique grâce aux seules énergies renouvelables. Les Allemands, qui nous taillent d'allègres croupières dans ce domaine depuis quelques années (et en profitent pour éteindre un à un leurs réacteurs nucléaires), s'en donnent à cœur joie dans ce marché immense et vierge. Y compris dans le domaine de la géothermie profonde, qu'ils ont abandonné en Europe pour ne pas avoir à y souffrir de la vindicte hargneuse des lobbies de l'atome et du pétrole.</p> <p>Dans un tel contexte, il est impossible de comprendre la farouche volonté des Iraniens de maîtriser les techniques du nucléaire si l'on ne prend pas en compte l'aspect politique et stratégique de ces dernières. Pour un pays comme l'Iran, l'argument français d'indépendance énergétique (dont les Verts ont, par ailleurs, démontré depuis longtemps l'inanité) ne tient pas ; et pourtant, ses dirigeants en font un usage diplomatique effréné. Le message gouvernemental officiel repose sur le simple accès au nucléaire civil. En cela, il ne fait que reprendre à son compte le grand mensonge de de Gaulle et de ses successeurs. N'importe quel Iranien croisé dans la rue vous avouera à voix basse (mais convaincue) qu'il ne supporte pas qu'on interdise à son pays d'avoir la bombe, alors que le Pakistan et Israël tout proches l'ont déjà. On connaît depuis longtemps le courage et la vaillance des Perses. Il semble cependant qu'on n'ait pas encore mesuré à leurs justes valeurs toute la fierté qu'ils éprouvent de ces qualités et toute la confiance qui les anime d'avoir su repousser l'invasion irakienne. Il y a là un cocktail dangereux, propice à entraîner ce peuple vers des extrémités fatales.</p> <p>Mais on peut aussi être amené à penser que c'est justement sur ce chemin que les stratèges états-uniens cherchent à attirer l'Iran. Voilà bientôt un an que la diplomatie européenne cherche à calmer le jeu, mais ses efforts - affichés mais d'une hypocrisie éhontée, tant que la France n'aura pas elle-même dénoncé son propre mensonge - sont vains au regard de la détermination du gouvernement des USA à contraindre l'Iran à la faute évidente, celle qui obligera l'ONU à lui signer le chèque en blanc d'une intervention militaire.</p> <p>Pour un homme tombé sous le charme de l'Iran et de ses habitants, c'est un crève-cœur que de voir ses dirigeants faire tout seuls le jeu de celui qu'ils nomment le Grand Satan. Il est vrai qu'ils ne peuvent adopter nulle autre stratégie. Leur contrôle du pays ne tient qu'à un fil, celui de l'animosité de sa population envers les USA et Israël. Plus elle monte, plus les élections leur sont favorables, et plus l'espoir d'une alternative démocratique et laïque s'estompe. Bush et ses conseillers le savent : le peuple iranien sombre dans une transe schizophrénique proche du coma mental dépassé. Epris de liberté, de paix et de prospérité, il a appris à survivre sous le joug, la guerre et la misère provoquée (par le blocus technologique et le surarmement). Mais à quel prix ! Aujourd'hui, il se résigne à l'issue fatale.</p> <p>Bush le sait encore mieux : il y a en Iran une bourgeoisie qui ne s'est jamais résignée au départ du Shah. Ses hommes y ont perdu le pouvoir, et ses femmes l'émancipation que leur Impératrice leur avait offerte. Cette bourgeoisie attend elle aussi, avec gourmandise et impatience, le faux-pas des mollahs et l'invasion des GI. Rien de tout cela n'existait en Irak : il n'aurait su y avoir de relève, et la chienlit était la seule issue prévisible à la guerre. L'Iran donc aura la bombe, mais pas celle que ses dirigeants croient.</p></div> https://www.traditionrolex.com/18 https://www.traditionrolex.com/18